Terriers occupés ?
Le sous-bois sent bon la mousse humide et les champignons. La lumière printanière traverse la frondaison entre les jeunes pousses des hêtres. Chant flûté du roitelet huppé ...
série de notes mélodieuses : la grive musicienne porte bien son nom ! L’année dernière une famille de renards avait élu domicile sous cette hêtraie.
Devant les anciens terriers, profonds sillons de terre fraîchement retournée, herbe sèche, indices de la présence du blaireau. Vite un petit test sur la sortie qui me paraît la plus fréquentée : Il suffit de mettre une branchette en travers du trou, en sortant, l'animal la fera tomber, et oubliera de la remettre, évidemment ! Le lendemain, la planchette s'est volatilisée : test positif !
Vers 16h, je m'installe sous le vent, face à la « bouche ». Cette première attente paraît toujours un peu longue et incertaine. Une heure passe, puis deux... la lumière est belle
en ce mois de mai. Il fera jour jusqu'à 21h30. Alors patience... même si je ne fais pas de photos, observer « l’ourson des bois » est une source de joie.
Je somnole bien calé contre un tronc : il faut toujours s’installer confortablement sinon le plaisir se transforme en souffrance. Les heures passent, tout est calme, branches et feuillage bougent doucement. Un bruit de feuilles me tire de mes songes, je n’ose pas bouger, tends l'oreille, distingue des grattages nerveux et répétés : un merle vermille.
Une demi heure plus tard : nouveau bruit, un autre merle ? Non un jeune blaireau qui trottine et rentre dans le terrier. Une famille habite ici. Bonne nouvelle.
Instants magiques... ambiance entre chien et loup, la lumière décline, effluves de mousse, de champignons... Une ombre... la lune apparaît... un blaireautin ! Non deux, trois, quatre, cinq ! Quelle agitation, ils se chamaillent, se grattent, grognent, gémissent... Une autre apparition, plus volumineuse, s'approche… un adulte, se secoue, se gratte puis disparaît avec les petits.
Le silence s'installe, rien ne bouge, cette courte observation me fruste un peu, je reviendrai... à bientôt les blaireaux !
Dès 16 h, le lendemain, je suis dans l'affût. Deux heures plus tard, un jeune blaireau sort du terrier, s'assoit à l'entrée, bientôt suivi par quatre autres jeunes. Ils semblent confiants.
Le bruit du déclencheur de mon appareil les effraie, ils plongent sous terre, reviennent vite. D’abord méfiants, ils s’enhardissent .... l’adulte sort, semble inquiet, nerveux, très vite ils se dispersent dans le sous-bois.
Le même scénario se déroule les jours suivants : à l'aube, ils rentrent directement dans leur galerie, le soir ils sortent, s'attardent un peu devant le terrier et s'éloignent.
D'autres « branchette-présence », m'indiquent qu’un animal sort dans la journée... un blaireau ? non, un renard ? une fouine ?
Je reste une journée entière dans l'affût ; grande surprise, un jeune blaireau sort et part dans la forêt... je le suis. En quête de nourriture, il ne s'aperçoit pas de ma présence.
Je repère son parcours. Le jour d'après, recouvert d'un filet de camouflage, allongé sur le sol, je me poste sur sa piste. Surpris, devant cet « animal étrange », il fait face, souffle, grogne en se gonflant, s'éloigne sans se retourner.
Plusieurs jours de suite, ce blaireau sortira en plein après-midi. Discrètement, je le suivais, il finira par accepter que je le photographie à moins d'un mètre.